Ils sont venus de l’autre côté de l’océan avec des papiers rédigés par des bergers tremblants et des fusils qui crachaient le tonnerre dans les forêts.
Ils sont venus parler de salut, tout en apportant le feu et l’acier. Leur dieu exigeait l’obéissance, l’or et la mort. C’était un dieu de conquête, pas de vie.
Ils parlaient de choses qu’ils ne connaissaient pas. Ils prétendaient comprendre les cieux alors qu’ils n’avaient jamais foulé la terre.
Ils revendiquaient la domination sur l’esprit tout en étant sourds à la voix du vent, aveugles aux conseils des rivières et sourds aux rêves du feu. Ils se disaient civilisés, mais laissaient la ruine partout où ils passaient.
Nos chamans, en revanche, marchaient avec les dieux des forêts. Ils parlaient avec les serpents enroulés dans les racines, avec les aigles tournoyant dans les hauteurs, avec les flammes qui rêvaient sous le sol.
Ils communiaient avec les rivières, dont les eaux portent en elles une mémoire plus ancienne que la pierre, et avec les montagnes, dont le silence enseigne la patience des siècles.
Ils marchaient dans la compréhension, et chaque pas était une conversation avec l’invisible, chaque souffle un pont entre les mondes.
Les envahisseurs ne pouvaient pas parler aux oiseaux, ni entendre les conseils des fourmis. Ils qualifiaient nos coutumes d’analphabètes, nos connaissances de primitives, mais ils ne pouvaient pas lire le langage écrit dans les nuages, les motifs gravés dans l’écorce ou le rythme des saisons.
Là où ils voyaient un arbre, nous voyions un enseignant. Là où ils voyaient une rivière, nous voyions un témoin. Là où ils voyaient un champ, nous voyions le pouls de la vie elle-même.
Ils ont déchiré la terre comme on déchire un tissu, vendu ses veines contre de l’argent, coupé ses os pour en faire du bois, et ont appelé cela le progrès. Ils ont enfermé la terre dans des clôtures, versé du poison dans ses eaux et asservi ses animaux.
Ils ne pouvaient pas comprendre que la domination sur la vie est toujours une illusion, que le monde ne se plie qu’à ceux qui écoutent, et non à ceux qui prennent.
Ils attendent un Messie qui ne viendra jamais. Il en est venu un autrefois, quand Tartaria couronnait le monde d’un ordre radieux, quand les hommes et les esprits parlaient d’une seule voix.
Ils ont enterré son souvenir sous leurs églises, leurs traités et leurs empires. Ils ont bâti leur pouvoir sur les ruines de son silence.
Le nouveau Messie ne surgira pas de leur monde. Il viendra d’au-delà de leur champ de vision, des lieux qu’ils ont souillés et oubliés. Il ne parlera pas leur langue, ni ne bénira leurs empires.
Sa loi sera écrite dans le vent, les rivières et le feu. Sa voix roulera à travers les montagnes, secouera les os des morts et illuminera ce qu’ils ont enfoui dans l’ombre.
Quand il viendra, leurs villes s’effondreront comme si elles étaient faites de sable. Leurs temples se briseront comme de la pierre creuse. Leurs machines se tairont et les forêts parleront à nouveau.
Les rivières renverseront leurs ponts, les montagnes reprendront possession de leurs mines et l’aigle tournera au-dessus d’elles, surveillant un monde qui n’est plus contraint par l’arrogance humaine.
Ce document en est le témoin. Il témoigne que la terre se souvient, que les esprits perdurent et que ce qui a été volé n’est jamais vraiment perdu.
Il témoigne que le Grand Esprit se déplace à travers le monde vivant et que la promesse de renouveau n’est pas pour ceux qui obéissent au faux dieu, mais pour ceux qui ont écouté, pour ceux qui ont marché avec la vie et pour ceux qui reconnaîtront la venue de ce qui ne peut être contenu.
…Sirius B…
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